
Difficile de passer à coté de l’un des romans les plus retentissants de la rentrée littéraire d’hiver. Après le succès de L’insouciance (2016) et Les choses humaines (2019), Karine Tuil lance son lecteur dans La décision, son nouveau roman édité chez Gallimard. Une intrigue vibrante qui se positionne volontiers à côté du dernier Pierre Lemaitre ou Nicolas Mathieu dans la liste des sorties à lire absolument.
Mai 2016, Paris. Alma, juge d’instruction antiterroriste, doit se prononcer sur la possible remise en liberté d’un jeune homme suspecté d’être parti en Syrie pour combattre aux côtés de l’Etat Islamique. Une décision dont l’aspect délicat est accentué par sa liaison amoureuse avec Emmanuel, l’avocat du mis en examen. Tandis que les choix de chacun peuvent avoir un impact évident sur la sécurité de toute une population, une question persiste : l’objectivité existe-t-elle vraiment lorsque la justice s’acoquine à l’intime ?
« Toute notre vie durant, on essaye de tenir le malheur à distance, et c’est encore plus vrai dans une société qui a fait de l’exhibition d’un bonheur factice le gage d’une intégration réussie, une société qui cache ses morts, ses pauvres, ses malades, qui réclame de la vitalité, de la jeunesse, de la beauté, rien de déformé, rien d’âpre, personne n’en parle par superstition, on développe nos propres subterfuges, on espère passer entre les mailles du filet, et un jour, on reçoit un appel et on comprend que c’est fini, on a été pris dans la nasse. »
Karine Tuil dresse un roman hautement philosophique qui rappelle indéniablement les plus grands plaidoyers sur l’humanisme, la liberté et la justice. Il interpelle son lecteur avec force tout en lui laissant une impression de déjà-vu et un tiraillement au creux du ventre. Il est question ici de remettre l’humain au centre de toute chose, dans son apparat le plus simple : celui d’être pourvu de sentiments et constitué d’un passé qui fonde ses actions au cours de son existence.
On s’immerge dans le quotidien complexe de cette juge d’instruction antiterroriste dont le métier consiste à redonner au détenu sa condition d’homme en prenant en compte chaque détail de ce qui le construit. La possibilité de se tromper est grande mais celle de rendre justice encore plus. S’opère alors un jeu de miroir qui renvoie la protagoniste à sa propre condition de femme en plein divorce et passionnée par une relation extra-conjugale qui défie les lois de la bienséance juridique.
La décision décortique le rôle de celui qui exerce ce métier de pouvoir tout en ouvrant les remparts entre le monde professionnel et celui de l’intime. La question de la subjectivité prenant le pas sur l’objectivité séduit et interpelle quand le métier lui-même pousse à se déshumaniser pour la loyauté. Le roman entre dans la danse des intrigues psychologiques et sociétales tout en en démystifiant certains aspects. Il percute par la douce insolence de sa pensée à contre-courant qui, il faut le dire, fait beaucoup de bien.
Jouant avec le plasma des émotions véritables, Karine Tuil a vraisemblablement longuement travaillé son sujet, nous tenant ainsi en apnée jusqu’au dénouement qui éveille et sublime la place du bien et du mal dans nos sociétés contemporaines.
il a l’air très fort en effet!
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On n’a pas lu le même bouquin. Celui-ci m’est tombé de mains rapidement. Lieux communs, platitude de l’écriture, impression de lire du mauvais journalisme gavé de bons sentiments, non un roman. Gallimard publie vraiment n’importe quoi.
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